La femme infidèle

 

La femme infidèle

Peut-on vraiment distinguer l’infidélité féminine de l’infidélité masculine? Est-ce que, comme on l’entend parfois, les femmes sont incapables de séparer le plaisir de l’amour ou bien les femmes nouvelles générations peuvent-elles surfer sur la vague du plaisir sans jamais avoir à en souffrir ?

Ce qui ressort du discours des patientes actuellement c’est bien plutôt la dissociation d’une relation conjugale et familiale stable avec, à côté, une ou plusieurs autres relations amoureuses, sources de jouissance.

Pour les femmes, il sera difficilement supportable de ne recevoir qu’une gratification sexuelle de la part de leurs amants. Seul l’amour permet de masquer la crudité du désir et c’est pourquoi il est valorisé et recherché par elles, même dans l’adultère.

Finalement, comme dans une relation « officielle », l’intrication du désir et de l’amour est toujours présente, au risque sinon de vivre un sentiment de déchéance et d’objectalisation (« je ne suis qu’un objet sexuel pour lui »). Même parmi les femmes qui vivent bien leur sexualité, il n’est pas rare que le doute s’insinue parfois lorsqu’elles se demandent si ce ne sont pas des salopes…

Les femmes, des amoureuses passionnées !

A la différence des hommes qui ont tendance à s’en méfier, les femmes sont attirées par les histoires d’amour, comme en témoigne d’ailleurs la littérature féminine.

Nous pourrions dire en quelque sorte qu’avec son amant elle cherche à revivre les débuts passionnés d’une relation amoureuse. Cet effet « lune de miel » de la rencontre amoureuse (1) amène chez celle qui le vit un gonflement narcissique, une impression de vivre intensément ou de revivre, de se sentir débordée de féminité … S’y ajoute évidemment la jouissance de transgresser un interdit. 

Chez les femmes infidèles, on trouve la recherche de régression vers un univers de caresses, d’un bercement dans un bain de paroles, se laissant être possédée par son amant, s’abandonnant à celui-ci, et se laissant être effractées par les forces pulsionnelles à l’intérieur d’elles-mêmes. Dans la littérature féminine, des pages entières sont consacrées à la séduction et aux préliminaires entre deux personnes, mais pratiquement aucunes lignes sur l’acte sexuel en lui-même(2).

Les relations adultères se situeront pour elles du côté de la passion amoureuse, alors que l’amour sera du côté du mari. Notons que cette possibilité de s’adonner à ces relations parcellaires n’est possible que grâce à la présence du mari, garant de la loi et du cadre. Elles sont en quelque sorte protégées par lui, les empêchant de se perdre dans les tourments de la passion. 

Le cas de René et d’Agnès (3)

René apprend l’infidélité de son épouse Agnès, avec qui il est marié depuis 10 ans. Ils avaient accueillit le neveu de René chez eux, et durant son hébergement, il a noué une relation intime avec Agnès. Déjà depuis un an, elle lui reprochait son manque d’ardeur sexuelle. De son côté, René se sentait humilié de la faiblesse de ses érections et de ses éjaculations toujours trop précoces, intervenant lorsqu’il s’imagine tout le plaisir que son épouse pourrait éprouver dans les bras d’amants prestigieux. Agnès a fini par lui avouer son infidélité lorsqu’elle a appris que son amant ne lui était pas fidèle, pour se venger de lui. Si au départ elle lui avoue, c’est qu’elle pense qu’il va lui donner une bonne correction. Mais, il n’en est rien ! René décide de mettre son neveu dehors et de jouer le rôle de mari au grand cœur en lui pardonnant et en la consolant. Agnès perd un amant mais découvre alors un mari digne d’être aimé et de la rendre heureuse. De son côté René peut enfin prendre la place d’un mari.

France Bernard

1- La rencontre amoureuse, Thème 1 « le couple, généralités »

2- A. Houel, L’adultère au féminin et son roman, Armand Colin, Paris, 1999, p.116

3- R. Viry, Psychopathologie de la vie amoureuse, Etudes de cas, Presses Universitaires de Nancy, 1998, pp.124-127

Que sais-je? Le Burn out (livre)

Que-sais-je ?

Le burn out

de Philippe Zawieja

De la baisse de régime à la surchauffe.

Au travail, vous vous sentez apathique ou au contraire, surinvesti. Vous vous montrez cynique envers vos collègues. Vous souffrez de ne pas être reconnu à votre juste valeurque sais je burn out. Vous avez perdu confiance en vous. Alors vous faîtes peut-être partie des 5 à 10% de la population active victimes de burn out. Omniprésent dans le langage courant et dans les médias, ce mot a fini par désigner toutes les formes de fatigue liée au travail. Pour clarifier la situation, le présent ouvrage adopte une démarche psychosociologique, tout en puisant ses exemples dans la psychologie, la psychanalyse, la sociologue, les sciences du management, la médecine ou la philosophie… Une telle approche est en effet indispensable pour se faire une idée globale, et parfois critique du burn out.

Philippe Zawieja est Docteur en sciences et génie des activités à risque, chercheur associé au centre de recherche sur les risques et les crises des Mines Paris Tech. Avec Franck Guarnieri, il a dirigé le Dictionnaire des risques psychosociaux (Seuil, 2014).

Le Burn out

Définitions: pour le Larousse, c’est un syndrome d’épuisement professionnel. On retrouve une fatigue psychique et physique accompagnée d’un sentiment d’impuissance et de désespoir.

imagesLa définition la plus consensuelle concernant le burn out est celle de Schaufeli et Enzmann : «le burn out est un état d’esprit durable, négatif et lié au travail affectant des individus «normaux». Il est d’abord marqué par l’épuisement, accompagné d’anxiété et de stress dépassé, d’un sentiment d’amoindrissement de l’efficacité, d’une chute de la motivation et du développement de comportements dysfonctionnels au travail. Cette condition psychique est progressive et peut longtemps passer inaperçue du sujet lui-même. Elle résulte d’une inadéquation entre les intentions et la réalité professionnelle. Le burn out s’installe en raisons de mauvaises stratégies d’adaptation associées au syndrome, souvent auto-entretenu.»

L’origine de burn out : c’est aux USA que Bradley a lancé le mot, mot qui fut ensuite repris par Freudenberger, psychanalyste, en 1974. Il l’a utilisé pour décrire ce dont il a lui même était victime : « en tant que psychanalyste et praticien je me suis rendue compte que les gens sont victimes d’incendies, tout comme les immeuble (…) face à notre monde complexe, notre psychisme finit par se consumer et se détruire sous son effet malgré le côté intact à l’extérieur. »

C’est une pathologie «limite» dans le sens où elle se situe entre le monde extérieur et le psychisme. Elle est due à un dysfonctionnement entre le sujet et le monde extérieur. Il y a une potentialité psychique chez la personne mais une exigence extérieur vient la bloquer (en général, venant du monde du travail), et cette potentialité va se retourner contre le sujet lui-même. La cause serait un court-circuit entre les désirs internes du sujet et les souhaits du monde extérieur.

Ce n’est pas une question de position sociale, tout le monde est touché. Aujourd’hui, 3 000 000 de français seraient exposés : 12% des actifs, 23% des agriculteurs, 19% des artisans et des chefs d’entreprise, ainsi que 19% des cadres. Les femmes sont toujours plus nombreuses que les hommes dans toutes ces catégories. Le burn out étant lié à l’emploi, au monde social, les chômeurs également sont susceptibles de faire un burn out.

Les symptômes

Le burn out est un syndrome et non une maladie, on a du mal à la qualifier car les symptômes apparaissent en positif ou en négatif comme dans le cas de la fatigue: «je me sens toujours fatiguée» avec le paradoxe dans certains cas où la personne ne l’est jamais.

1) la fatigue : elle est sans commune mesure avec la charge de travail. La personne pourra dire « je me sens toujours fatiguée », avec le paradoxe dans certains cas où la personne ne ressent jamais aucune fatigue.

2) la chute de l’estime de soi: un sentiment d’inutilité envahit le sujet. Il se met à penser qu’il n’y arrivera jamais (ceux qui n’ont pas de postes importants ne peuvent se raccrocher à l’image que leur renvoie leur position au sein de l’entreprise). Le narcissisme est touché de façon plus intense que dans la dépression. Ce signe est également à double sens car dans d’autres cas, le narcissisme est exacerbé avec des personnes qui auront le sentiment d’être indispensable « sans moi, les choses ne vont pas fonctionner ».

3) le désespoir : avec l’idée que cela ne passera pas.

4) un épuisement psychique, une incapacité de penser : les personnes vont se plaindre que leur tête est vide, que cela ne circule plus à l’intérieur.

5) L’isolement avec l’entourage : tendance à s’éloigner de ses proches.

6) Le désintérêt pour tout: le monde étant trop charger, trop excitant et stimulant, ils finissent par bloquer toute potentialité de communication avec les autres alors que cela pourrait leur permettre de ré-investir d’autres activités et relations que le travail.

7) troubles psychosomatiques et physiques : les troubles psychosomatiques ne sont pas une si mauvaises choses ici, cela veut dire que les affects trouvent encore un moyen de s’exprimer et que le corps continue à se battre (c’est plutôt un bon signe sauf si cela est chronique).

8) La tentation d’en finir : si le déprimé peut en jouer, ici, la personne n’en parle pas et risque de passer à l’acte (ce qui est congruent avec le retrait vis à vis des proches).

9) les comportements à risque

10) le sujet ne voit rien venir et nie les signes d’avertissement : là encore c’est une différence avec la dépression. Les sujets ne voient pas qu’ils s’enfoncent peu à peu. Ils ont une conviction interne que cela ne dépend que d’eux (« je vais m’en sortir et gérer »), alors que le déprimé est tourné vers l’extérieur (« on ne m’aime pas », « les autres ne veulent pas que je réussisse »). Ce sont des gens qui ont une haute estime d’eux même et se disent qu’ils ont la capacité de s’en sortir. Cette croyance en leurs capacités fait que ce sont des gens qui ne viennent pas beaucoup consulter.

Les signes sont très variables d’un sujet à l’autre, ils peuvent également s’inverser. C’est leur assemblage dans un contexte professionnel qui permettra le diagnostic de burn out.

Origine immédiate

– L’exaltation de la performance individuelle : le sujet vit dans un contexte où la performance est au centre du système, à tout prix.

– La disparition de la relation transversale au profit de la relation verticale : peu à peu la relation horizontale s’est émiettée (le groupe de collègues), au profit du patron qui pourtant ne respecte pas l’autre, le patron vise la tâche à accomplir, la performance et non le sujet en tant que tel (« vous ne m’intéressez pas si vous ne décrochez pas le marché, vous êtes remplaçables »). Au niveau des collègues, il va régner la rivalité et la compétition individuelle pour répondre aux exigences du patron, et non l’entraide (d’où l’émiettement des relations horizontales).

– Une souffrance éthique : c’est à dire une souffrance vis à vis de ses idéaux, des choses qu’on est obligé de faire mais qui sont en désaccord avec nos idéaux, c’est donc source de souffrance morale. Demander de renoncer à ses idéaux rejoint les situations de harcèlement moral.

– Lorsqu’une entreprise suscite des burn out, les autres restent dans le silence : la tendance à s’isoler des sujets faisant en burn out fait écho au silence des autres dans l’entreprise.

– Un investissement trop intense, sans limites, totalitaire du travail : au départ, ils investissent d’autres choses que le travail mais peu à peu il n’y aura plus que cela qu’ils investiront.

2- Le point de vue psychologique

Dans le cas du burn out, l’affect qui prédomine est la culpabilité. Elle est centrale : si je suis coupable, je ne suis bon qu’à être jeté au feu ( punition d’aller brûler en enfer = burn out). C’est l’idée que la culpabilité va mener le sujet à la destruction. Ce sont de sujets qui ont une culpabilité énorme avant que tout cela n’arrive et c’est sur cette culpabilité que peuvent jouer les patrons. Les personnes qui culpabilisent en général beaucoup sont des proies toutes trouvées pour le burn out car elles réagissent toujours comme si elles étaient coupables. Cette culpabilité va amener le sujet à penser « je ne suis bon à rien ».

Le sujet : il est désinséré, il n’est plus dans l’intersubjectivité, et c’est en nous parlant à nous, thérapeute, comme sujet qu’il pourrait se réinsérer dans l’intersubjectivité et travailler sur toute cette culpabilité. Le plus important est de ne pas rétablir une situation de domination car c’est ce qui risque de se rejouer dans la relation thérapeutique.

Le désir : lorsque quelqu’un s’est investit dans le travail à s’en rendre malade, c’est qu’il a confondu le désir projet avec le projet. C’est primordial de voir ce qu’il se passe autour de ce collage au travail.

L’idéal : il va cadrer le désir et lui permettre de trouver sa place, d’avoir des perspectives importantes. Lorsqu’il ne peut pas être respecté (comme dans les cas de burn out), cela devient tragique, l’idéal devient persécuteur et la culpabilité nous écrase.

Soigner un sujet atteint de burn out

Dans l’action directe (avant la thérapie, de l’extérieur) :

Tout doit être mis en place pour casser l’investissement totalitaire du travail (c’est suicidaire humainement et psychologiquement). C’est « confortable » pour le sujet car il n’a qu’une visée : tout investir dans le travail, sur une seule chose. Il faut inciter le sujet à avoir un hobby, de reprendre une vie de famille, inviter des amis ou encore remettre l’importance de la vie sexuelle au sein du couple. Il faut que le sujet se restaure un réseau (remise en mouvement de l’intersubjectivité) : c’est fondamentale que cela reprenne.

L’action psychique :

Il s’agit de débuter dans un premier temps une psychothérapie en face à face (il faut qu’ils puissent vider leur trop pleins avant de faire une analyse s’ils le désirent). Il y a des entendu réel de sa vie qui sont indispensables.

Il va falloir parler des idéaux et lui faire parler de ses idéaux, car le burn out est une attaque des soubassements éthiques de leur identité (liaison entre idéaux et identité).

Il s’agit d’aller interroger le désir et peu à peu travailler à dégager le désir de l’engagement professionnel avec lequel il a été confondu. Le désir projet ne doit pas être confondu avec l’engagement car c’est une façon de soumettre la vie psychique à une réalité matérielle. En effet, plus vous avez de possibilité moins vous êtes dépendants de la réalité qu’on vous impose.