La jalousie est un sentiment humain vécu par tous mais qui n’a pas toujours bonne presse. Elle est à la fois susceptible de montrer à l’autre qu’on tient à lui, ou au contraire mener à des actes et des conduites extrêmes. On la retrouve dans un versant tragique sous la plume de Shakespeare où Othello va jusqu’au meurtre de sa femme ; ou plus quotidiennement au sein des couples au sujet de sorties nocturnes, de fréquentations etc.
Définitions
Dans une première définition, c’est un « sentiment hostile qu’on éprouve en voyant un autre jouir d’un avantage qu’on ne possède pas ou qu’on désirerait posséder seul » ;
Une deuxième met l’accent sur l’idée de la perte et de la souffrance : « sentiment douloureux que font naître les exigences d’un amour inquiet, le désir de possession exclusive de la personne aimée, de la crainte de son infidélité. »
Dans les deux cas, nous retrouvons l’idée de possession et de désir.
Bien qu’on pense plus souvent à la jalousie dans le couple, elle touche toutes nos relations sociales : de nos relations fraternelles, amicales, professionnelles à nos relations de voisinage.
Paul Laurent Assoun (1) dégage 4 traits chez l’amoureux(se) : le deuil, la perte (narcissique), l’agressivité et la culpabilité.
Il y a effectivement l’idée d’une réaction à une perte, qu’elle soit réelle ou imaginaire. Le jaloux vit cette situation comme menaçante, prête à se produire, tout en créant et entretenant cette menace.
La perte narcissique implique la revendication de son statut de victime, victime de sa partenaire tout comme de celui qui les sépare.
L’agressivité est plus évidente, c’est à dire que le jaloux en veut à l’autre supposé détenteur de son objet et ayant infligé la blessure.
La culpabilité, elle, est souvent inconsciente, et se développe à l’ombre de la culpabilisation consciente de l’autre. Il se tient pour en partie responsable, n’ayant pas tout tenté pour que la situation ne se produise. Il y a donc un fond d’auto-reproches.
La jalousie « normale »
Tout un chacun ressent de la jalousie à l’égard d’un autre : pour une voisine qu’on estimera plus jolie, ou pour un collègue de bureau de sa femme… Elle est tellement normale, que son absence dans certaines circonstances, parait à ceux qui en sont témoin comme étrange ou bizarre. Beaucoup se vantent dès lors d’être jaloux, comme si c’était une preuve d’amour (l’absence de jalousie serait vécue comme une indifférence pour l’autre).
La jalousie vient du sujet lui-même, c’est une création de l’imaginaire : on s’imagine que l’autre possède plus que nous ou veut posséder quelque chose que nous avons. Et c’est portée par leur imaginaire que certains vont flamber sur ce terrain, s’imaginant alors que quelqu’un pourrait leur dérober ce qu’ils chérissent, quitte à pour cela, empoisonner la vie de la personne avec qui ils partagent leur vie pour se rassurer.
Son intensité peut être régulée par la réaction du partenaire : tantôt elle pourra apaiser la souffrance du jaloux, ou au contraire aggraver la flambée. Bien entendu, il ne faut pas oublier qu’elle est déjà là, en chacun de nous. La jalousie est un sentiment que nous éprouvons très jeune, et le vécu actuel tire sa source des expériences antérieures. La réaction du partenaire actuel ne fera que l’augmenter ou la diminuer.
France Bernard
1- Paul-Laurent Assoun, Leçons psychanalytiques sur La Jalousie, 2eme ed., Economica/Anthropos (voir Bibliographie)